Enfants d’Ararat, Témoignages pour la reconnaissance du Génocide Arménien, de Françoise Rossi
Préface de Youri Djorkaeff
éd. L’Harmattan, Graveurs de Mémoire, Récits de vie / Méditerranée orientale, juin 2013, 20 €
Dans le cadre de son travail de préservation des mémoires, Françoise Rossi a décidé de se consacrer à celle des Arméniens. Pour ce faire, elle a recueilli de précieux témoignages essentiellement d’Arméniens vivant dans le Sud de la France.
Les récits relatés dans la première partie de son ouvrage consacrée au Génocide de 1915 font un écho tout particulier aux Enfants de l’oubli, magnifique roman à succès de Raffy Shart paru en 2012. Sans emprunter la voie romanesque, Françoise Rossi livre des témoignages bruts. Ils n’en restent pas moins tout aussi insupportables et éclairants des pratiques génocidaires mises en œuvre au début du XXème siècle à l’encontre des Arméniens de l’Empire ottoman et toujours non sanctionnées à ce jour.
De ce formidable travail de compilation, on regrettera un défaut d’harmonisation entre les différents récits qui, espérons-le, pourra être corrigé lors d’une prochaine édition.
L’histoire des Arméniens ne se résumant pas à ce seul drame, Françoise Rossi retrace ensuite l’arrivée des rescapés à Marseille, leur séjour au camp Oddo, et leur ancrage dans le Sud de la France. On lira notamment avec intérêt l’installation progressive des Arméniens à Nice autour du quartier de la Madeleine.
Suivant le cours de l’Histoire, Enfants d’Ararat, n’oublie pas les résistants durant la seconde Guerre mondiale avant de nous emmener à la découverte de l’immigration venue de Turquie dans les années 70 et d’évoquer ensuite celle en provenance d’Arménie dans les années 2000.
Avec Enfants d’Ararat, Françoise Rossi a fourni un livre utile à destination tant des Arméniens que de la société française. A ce titre, il mériterait très certainement d’être étudié dans les écoles de la République comme un véritable témoignage d’une partie de l’histoire du XXème siècle.
Entretien avec l’auteure réalisé le 2 juillet 2013 :
Françoise Rossi, vous qui n’êtes pas arménienne, comment vous est venue l’idée de ce livre ?
FR : Sourires. J’ai tout d’abord commencé à me consacrer à des récits de vie en vue de la transmission de la mémoire familiale. Mon frère a, depuis l’école, un très bon ami arménien et m’a orienté vers lui. J’ai alors pris conscience que l’on ne parle jamais de la communauté arménienne qui elle-même reste très pudique. J’ai décidé de m’y intéresser. J’ai pris de cours tous les mercredis et une annonce a été passée dans Parév pour évoquer mon travail de recherche. Mon agenda s’est alors très vite rempli sur une année pleine. Au fil des rencontres, j’ai modifié mon objectif. De la transmission d’une mémoire familiale, j’ai décidé de consacrer mon ouvrage à la reconnaissance du génocide arménien.
En lisant votre livre on comprend que votre travail a été facilité par la coopération de celles et ceux qui ont témoigné. Est-ce bien le cas ?
FR : Complètement. Tout le monde m’a aidé et a répondu présent. Les personnes ont déballé des cartons, sorti des photos, m’ont transmis des manuscrits… Mon livre représente 4 années de travail, puis 2 années pour trouver le bon éditeur. Mais même si cette dernière partie a repréenté une grande souffrance, je me suis dit qu’il n’y avait pas d’urgence car je travaille sur la mémoire.
Pourquoi vous être « limitée » au récit des Arméniens de la Cote d’Azur ?
FR : Je n’ai pas fait témoigner que des personnes du Sud mais il est vrai que cela représente la plupart des personnes que j’ai rencontrées. Au départ, je ne m’attendais pas à ce que les personnes s’ouvrent autant à moi. J’ai reçu tellement de témoignages que j’ai disposé de suffisamment de quoi finaliser mon livre.
Quelles suites entendez-vous donner à votre livre ?
FR : Mon éditeur, l’Harmattan m’a demandé de l’enrichir dans la perspective d’avril 2015. J’ai déjà commencé à prendre des contacts à Paris, Décines et Valence. Nous aurons certainement l'occasion d'en rediscuter!./.